PISAN Christine de: Biographie et analyses des oeuvres

PISAN Christine de: Biographie et analyses des oeuvres

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Pisan D'origine vénitienne, mais élevée à la cour de France, Christine de Pizan est notre première femme de lettres: pour gagner sa vie, après son veuvage, elle publie des ouvrages en prose et en vers souvent pour répondre aux commandes de la cour de Charles VI et d'Isabeau de Bavière.
Sa poésie lyrique se caractérise par un ton très personnel sur les motifs traditionnels de l' Amour courtois ou de l'inconstance de Fortune (Cent Ballades, 1395-1400; Cent Ballades d'Amant et de Dame, 1410; Rondeaux; Livre de mutation de Fortune).

Étroitement mêlée à la vie politique de son époque, elle pressent les dangers que fait courir au royaume la rivalité entre les princes et "milite" en faveur de la conciliation entre les princes et pour la paix civile : l'Épître à Isabeau de Bavière (1405), la Lamentation sur les maux de la France (1410).
Lorsqu'elle se veut "philosophe", elle s'empare de tous les domaines du savoir, abordant aussi bien des sujets de politique (le Livre du corps de policie, 1404-1407), que de morale (le Livre de Preudhommie, 1405-1406; le Livre de la Paix, 1412-1414) ou de religion (les Sept Psaumes allégorisés, 1409-1410). Elle laissera même un traité d'art militaire (le Livre des faits d'armes et de chevalerie, 1410).
Toutefois, la partie savante de son oeuvre, où la sagesse s'alourdit d'une docte érudition, n'échappe pas toujours à une certaine lourdeur, découlant d'une recherche d'exhaustivité trop systématique et d'un goût trop prononcé pour le savoir encyclopédique.
Fidèle à la tradition médiévale, son oeuvre exploite largement le répertoire allégorique qui se mêle à de nombreux exemples tirés notamment de l'histoire antique (surtout de Valère Maxime). Le Livre du chemin de longue estude (1402-1403) raconte, en 6000 vers environ, un voyage onirique au pays de Sagesse et de Raison. L'Advision de Cristine (1405) est un récit allégorique où l'auteur évoque les malheurs de la France de son temps, introduisant parallèlement une réflexion sur son infortune personnelle. Dans le Livre de Mutacion de Fortune (1403), Christine de Pisan raconte comment le destin, en la faisant devenir écrivain, l'a fait changer de sexe : "de femelle devins masle", affirme-t-elle. Tout en s'identifiant à la fonction d'"homme de lettres" et fière de s'adonner ainsi à l'étude, elle n'oublie cependant jamais qu'elle doit défendre, contre les injustices de la société masculine, la dignité de son sexe.
Beaucoup de ses écrits doivent en effet être lus comme ceux d'un écrivain ayant fait de sa féminité une cause à défendre. (l'Épître au dieu d'Amours, 1399; Épistres du Débat sur le Roman de la Rose, 1401-1402; le Livre de la Cité des dames, 1404-1405). Ces textes s'élèvent contre la grossière misogynie de son temps, perceptible dans certains ouvrages littéraires : si, au côté de Jean de Gerson, elle attaque sévèrement le Roman de la Rose, elle se retourne aussi contre les oeuvres de l'Antiquité et s'en prend notamment à l'Art d'aimer d'Ovide. Parallèlement, et à plusieurs reprises, son oeuvre s'adresse directement aux femmes : dans l'Épître de la prison de la vie humaine (1418), elle cherche à réconforter les mères et les épouses endeuillées par la guerre. Son engagement pour inviter à reconsidérer la dignité des femmes se manifestera jusque dans son dernier ouvrage, dans lequel elle rend un vibrant hommage à Jeanne d'Arc (le Ditié de Jehanne D'Arc, 1429).
Parce qu'elle est la première à avoir formulé une protestation véhémente contre les préjugés discriminatoires à l'égard des femmes, Christine de Pisan a souvent été présentée comme une féministe d'avant-garde. Il ne faut cependant pas oublier la valeur littéraire de son oeuvre, qui fut très imitée jusqu'à la Renaissance. Moins appréciée dans les périodes qui suivirent, ses écrits furent redécouverts par la critique à la fin du XIXème siècle.

Quoique son style soit fluet et banal, elle a le grand mérite d’avoir pris la parole au nom des femmes, contre le flot de méchancetés que déversaient les écrivains du temps.




 

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