Le théâtre latin

Le théâtre latin

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Ses origines

Après la guerre du Péloponnèse qui a opposé les cités grecques, l'art dramatique entre dans une période d'évolution qui trouvera son accomplissement dans le théâtre latin. Bien que le lien de filiation entre le théâtre grec et le théâtre latin soit évident, il n'en reste pas moins que le théâtre latin a sa propre origine que les historiens font remonter aux ballets agrestes dédiés à la nature que les joueurs de flûte venus d'Etrurie exécutaient pour divertir les Romains. Ainsi, si le théâtre grec trouve son origine dans un rituel sacré, le théâtre latin trouve la sienne dans l'évocation d'une nature féconde, source de bienfaits. Le théâtre sera toujours perçu à Rome comme un art étranger. Les références constantes que les dramaturges latins font au théâtre grec, en même temps qu'elles soulignent la relation établie entre les deux, accréditent l'idée que le théâtre appartient d'abord au peuple que les Romains ont soumis. Le théâtre à Rome ne connaîtra jamais le succès qu'ont rencontré les jeux du cirque qui a toujours mieux correspondu aux goûts des Romains. Il faut noter que si les premiers cirques remontent à l'époque de Tarquin, les premiers théâtres en bois n'ont été construits qu'à partir du II° siècle avant J.C. et que le premier édifié en pierre ne date que de 54 avant J.C. Pour une part importante, le répertoire proposé a été longtemps constitué par les œuvres des auteurs grecs. Cependant celles-ci ont pu apparaître comme subversives au pouvoir romain qui voyait dans la liberté avec laquelle s'exprimait le peuple représenté par le chœur le risque d'une contestation de leur autorité par la plèbe. La méfiance montrée à l'encontre du théâtre se reportait d'ailleurs sur les acteurs qui, loin d'être vénérés comme ils l'étaient en Grèce, ont été déchu de leurs droits civiques. Nous nous attarderons sur quelques aspects du théâtre latin qui témoignent de l'évolution du théâtre grec et sur d'autres, qui annoncent le théâtre à l'italienne qui prévaudra partout en Europe à partir de la Renaissance.

Disparition du chœur-médiateur

Symptomatique est l'évolution de la place de l'acteur et, de façon corollaire, de celle du chœur. Si le protagoniste grec était bien sorti du chœur, il restait en quelque sorte toujours sous son contrôle. Chacune de ses actions, chacun de ses sentiments était l'objet d'une réaction du chœur qui n'avait abandonné en rien le rôle de médiateur qu'il lui revenait de jouer auprès du public. Avec le théâtre latin, l'acteur s'adresse directement au public, s'exprimant comme personnage d'un drame. Le monologue, mode d'expression créé par le théâtre latin, devient la forme usuelle à travers laquelle l'acteur se livre au public. Perdant sa fonction de témoin du drame, le chœur devient simple faire-valoir de l'acteur. On assiste par ailleurs à l'apparition de plusieurs chœurs, chacun prenant le parti d'un des personnages ou exprimant le point de vue propre de ceux qu'il représente. Le chœur devient alors lui-même acteur. L'évolution du chœur ne doit pas être seulement analysée comme une transformation dans la dramaturgie, mais aussi d'un point de vue politique. C'est dans l'organisation de la société latine qu'il faut rechercher les raisons de cette évolution. Le chœur dans le théâtre grec tenait la place qu'occupait le citoyen dans le débat public. Le citoyen grec était appelé à s'exprimer autant quand il s'agit du destin des héros que quand il s'agissait de l'administration et de l'organisation de la cité. Par ailleurs, il est indéniable que le théâtre latin a perdu le caractère sacré dont était encore empreint le théâtre grec pour devenir une manifestation civile. A cet égard, il est intéressant de relever que les sénateurs et autres dignitaires de l'état occupent au pied des gradins, devant la scène, la place qui était réservée jusqu'alors au chœur qui évoluera dorénavant avec les acteurs sur la scène. La cérémonie orchestrée par le chœur que constituait le drame grec est remplacée par la représentation des acteurs sous l'autorité vigilante des censeurs.

Fermeture

Le théâtre romain dont l'architecte Vitruve a donné les règles de construction est d'abord un auditorium adapté au chant, à la musique vocale et instrumentale qui prendront une part de plus en plus importante dans l'expression dramatique. C'est pour des raisons acoustiques qu'est créé en fond de scène un mur auquel il est adjoint deux avancées latérales qui ferment la scène. Cette disposition inaugure le théâtre dit fermé, qui s'imposera par la suite comme la solution la mieux adaptée à la représentation théâtrale. Nous aurons l'occasion, quand nous parlerons du théâtre à l'italienne, de revenir sur les principes qui organisent une telle scène. Parce que le chœur est devenu protagoniste du drame, il a rejoint les acteurs sur la scène. Celle-ci a dû être agrandie en même temps que l'orchestra était réduit et perdait la forme ronde qui lui venait des fêtes dionysiaques. Pour des raisons liées autant à l'acoustique qu'au confort du public, le théâtre latin tend au-dessus des gradins des velums qui, d'après les chroniqueurs, sont autant de voiles chatoyantes claquant dans le vent. Le théâtre se ferme.




 

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